Depuis l'été DeFi de 2020, porté par l'avancement continu des infrastructures blockchain, les protocoles DeFi ont évolué du Swap au Prêt puis au Yield Farming vers des protocoles de plus en plus sophistiqués, couvrant les stratégies de Yield Farming AMM (market making automatisé) basées sur les dérivés blockchain, les plateformes de prêt structurées construites sur l'infrastructure de prêt, et les protocoles de prêt on-chain connectant des garanties du monde réel, etc.

L'un des facteurs clés derrière l'essor de l'innovation DeFi est un concept appelé composabilité. La plupart du temps, lorsqu'un nouveau protocole DeFi est publié, la majorité de son code source est également mise à la disposition du public. Cela signifie que les codes sources des contrats intelligents d'un ou plusieurs protocoles DeFi peuvent être facilement composés ensemble pour en créer un nouveau. Ils fonctionnent comme des blocs Lego — des blocs de différentes formes peuvent être utilisés pour construire des projets uniques, réduisant significativement le coût de l'innovation.

Étonnamment, malgré ces innovations massives, le nombre d'utilisateurs DeFi n'a pas connu de croissance significative depuis 2020. Pendant ce temps, les institutions traditionnelles n'ont pas injecté de liquidités dans l'espace blockchain. L'une des causes majeures est la préoccupation concernant la sécurité de la DeFi.

La finance traditionnelle dispose d'un système sécurisé bien établi. Par exemple, lors du transfert de fonds de la Banque A à la Banque B, des fourgons blindés et des agents de police armés sont présents pour sécuriser les fonds, ce qui est un processus rassurant. De plus, les banques sont responsables des biens de leurs clients et offrent une compensation pour toute perte durant le processus. La DeFi, cependant, diffère du système financier traditionnel. Les contrats intelligents sont immuables par conception. Ce sont essentiellement des boîtes noires qui n'envoient pas de logs lisibles, donc les gens ne peuvent pas avoir une vue claire des processus internes. La plupart des audits de contrats intelligents ne sont pas utiles car ils se concentrent uniquement sur les formes d'attaques connues, plutôt que sur les nouveaux types de failles très susceptibles de se produire. Par ailleurs, de nombreux protocoles DeFi se présentent comme des produits "à utiliser à vos risques et périls". Cela peut effrayer les utilisateurs réguliers et les empêcher d'avoir confiance pour placer la majorité de leurs dépôts bancaires dans un écosystème DeFi. La DeFi n'a pas déçu ceux qui ne lui faisaient pas confiance. Jusqu'à présent, la DeFi a connu 82 violations de sécurité, avec un montant initial piraté de plus de 1,8 milliard de dollars. En particulier, le flash loan est l'attaque la plus courante, représentant 33 cas. L'une des raisons de sécurité derrière une attaque flash loan est l'absence du concept de temps précis et d'un mécanisme de confirmation dans les blockchains . Nous examinerons les raisons spécifiques dans les chapitres suivants.

I. Le Temps & le Réseau Temporel des Ordinateurs

Examinons d'abord comment fonctionne le temps dans les programmes informatiques conventionnels.

Le temps est un concept essentiel pour les programmes informatiques. Sans le concept de temps, il est impossible d'accéder à un site web sécurisé par TLS, de créer de l'entropie pour certains algorithmes, d'échanger des secrets, ou d'authentifier des licences Windows. Nous considérons la gestion du temps sur les ordinateurs comme acquise, mais l'échange et le suivi du temps est un problème incroyablement difficile à résoudre en termes d'opérations réelles.

Le temps est essentiellement une représentation de l'état global actuel de l'univers. Cela signifie que pour un moment donné, chaque entité doit partager exactement la même valeur. C'est évidemment un énorme problème pour les ordinateurs : Supposons qu'il y ait une énorme horloge atomique très précise au centre de l'univers, transmettant des données temporelles via Internet. Un problème durant ce processus est que la transmission des données prend du temps en soi. Lorsqu'un appareil reçoit des données temporelles via Internet et les applique à ses propres systèmes, l'état global de l'univers (le temps) aurait déjà changé. En d'autres termes, il est impossible pour un appareil en réseau d'être parfaitement synchronisé avec la valeur temporelle globale réelle.

Un autre problème avec la gestion du temps en réseau est que nous ne pouvons pas prédire parfaitement le temps nécessaire à la transmission des données — les conditions du réseau changent constamment, et personne ne peut garantir une fiabilité parfaite dans la nature. Combiné au premier problème, cela signifie que le destinataire ne peut pas non plus répliquer parfaitement la valeur temporelle, conduisant à des incohérences.

Le Network Time Protocol (NTP) résout ce problème grâce à la structure de vérification mutuelle des serveurs de temps distribués à travers le monde (jusqu'à 15 strates) et en construisant un arbre couvrant de plus court chemin de Bellman-Ford (qui réduit à la fois la latence et les incohérences de temps de transfert). Cela fonctionne parfaitement pour les ordinateurs personnels et les services centralisés, en particulier avec les applications qui dépendent d'un timing précis (par exemple les programmes de cryptage). Même si les horodatages dérivés via NTP sont de simples estimations, ils sont suffisamment précis et matures pour que les applications critiques en termes de temps puissent s'y fier.

Source : https://medium.com/@gokhansengun/bilgisayarlar-zaman%C4%B1-nas%C4%B1l-do%C4%9Fru-tutar-78c1203397f0

II. Mécanisme Temporel dans les Réseaux Blockchain

Le concept de temps existe également sur les blockchains. Bien que certains disent que la blockchain elle-même est un dérivé du concept de temps, le traitement du temps par un réseau blockchain est extrêmement imprécis comparé à la précision 64 bits du système NTP. Après tout, c'est aussi parce que les cibles de service du temps blockchain ne sont pas des applications de contrats intelligents sensibles au temps comme les applications DeFi. De plus, il vise à permettre l'exécution sécurisée et efficace du mécanisme de consensus. Un tel objectif différent rend également les réseaux blockchain plus tolérants aux imprécisions temporelles. Dans les paragraphes suivants, nous discuterons de certains mécanismes de consensus populaires et de leur façon de déterminer le temps. Cela dit, il convient de noter que la confirmation du temps sur les blockchains est généralement si imprécise qu'elles ne peuvent pas assurer les opérations financières et les contrôles de sécurité pour les actifs on-chain qui valent des dizaines de milliards de dollars.

1. Bitcoin

Bitcoin intègre le concept de temps car il est nécessaire pour son mécanisme de consensus Proof-of-Work. Sans horodatage valide, le réseau ne peut pas vérifier si une transaction particulière en cours de minage tente de falsifier une transaction précédente. Bien que chaque bloc Bitcoin contienne un horodatage UNIX, le temps d'un bloc n'est pas une représentation précise d'un horodatage UNIX. C'est parce que le consensus Bitcoin considère les horodatages uniquement comme une partie du système de sécurité PoW, et non comme un outil réel pour mesurer le temps sur la blockchain.

Pour citer Bitcoin Wiki, chaque bloc contient un horodatage Unix fourni par les mineurs et sera accepté comme valide s'il est 1) supérieur à l'horodatage médian des 11 blocs précédents et 2) inférieur au temps ajusté du réseau plus 2 heures. Par conséquent, la différence entre les temps des blocs et les temps réels varie d'une heure à deux heures.

Source : https://en.bitcoin.it/wiki/Block_timestamp

2. Ethereum

Dans le réseau Ethereum, les horodatages sont également soumis directement par les mineurs avec une grande flexibilité. En termes simples, un horodatage Ethereum peut être vrai ou faux, et il n'y a aucun moyen pour le mécanisme de consensus de confirmer son exactitude. Selon un post sur le forum Ethereum (source : https://ethereum.stackexchange.com/questions/413/can-a-contract-safely-rely-on-block-timestamp/428#428), plusieurs mécanismes peuvent être utilisés pour empêcher la déviation excessive des horodatages Ethereum : 1) Si l'horodatage d'un bloc dévie significativement du temps réel, personne ne voudra générer plus de blocs avec ce bloc comme bloc parent ; 2) L'horodatage du dernier bloc ne peut pas être antérieur au bloc parent ; 3) La difficulté du bloc sera la plus faible lorsque le bloc n'est pas marqué plus tôt que nécessaire. Ces mécanismes pourraient permettre aux mineurs de soumettre volontairement les horodatages qu'ils croient être corrects. Cependant, lorsque d'autres incitations externes existent, le réseau Ethereum ne dispose d'aucun mécanisme rigoureux pour s'assurer que les mineurs soumettent toujours l'horodatage correct. Par conséquent, le réseau ne peut pas garantir le bon fonctionnement des protocoles sensibles au temps (par exemple le yield farming, le prêt). Ainsi, les grandes institutions ne feront pas confiance à Ethereum avec leur argent.

3. Polkadot

Selon le document de Substrate, Polkadot marque également les blocs avec des horodatages qui sont directement fournis par les mineurs. Pendant ce temps, il n'y a pas de mécanismes rigoureux qui confirment ou synchronisent ces horodatages. Le document indique également que bien que le temps d'un bloc ne puisse pas être prouvé, les validateurs peuvent convenir qu'il se situe dans une certaine marge d'erreur de leur horloge système.

Source : https://wiki.polkadot.network/docs/build-protocol-info

4. Cosmos

Tendermint de Cosmos est le seul algorithme de consensus qui intègre le temps dans son mécanisme de consensus, ce qui lui confère la notion de temps la plus robuste. Plus précisément, les nœuds d'un bloc voteront sur le temps qu'il a soumis pour parvenir à un consensus, et seul l'horodatage approuvé par les nœuds sera inclus dans le bloc.

Source : https://docs.tendermint.com/master/spec/consensus/bft-time.html

III. L'Absence d'un Système d'Horodatage dans les Blocs

Les blockchains ne sont pas seulement imprécises en termes de génération d'horodatages, mais elles manquent également d'un système ou mécanisme d'horodatage au sein des blocs. Les transactions du monde réel sont envoyées puis confirmées une par une, chacune ayant un temps et une séquence clairement définis. Ainsi, de nombreuses transactions frauduleuses ne peuvent pas se produire ou être confirmées. Dans un réseau blockchain, en revanche, les transactions au sein de chaque bloc sont regroupées et ne sont pas marquées individuellement avec des horodatages précis.

Bien que toutes les transactions puissent être vérifiées après la génération du bloc, il est impossible de déterminer le moment précis de soumission et la séquence de chaque transaction. Cela explique en partie pourquoi de nombreuses attaques (par exemple les prêts flash ou les échanges flash) peuvent être réalisées. Si des marques temporelles précises étaient fournies dans les blocs comme preuve de vérification, les protocoles d'application pourraient développer des algorithmes plus sécurisés et stables. Par ailleurs, en raison de ses caractéristiques intrinsèques, le temps est un réseau de consensus hautement sécurisé qui est irréversible et immuable.

IV. Solutions Potentielles

Le manque de temps sur les blockchains peut être résolu de manière interne ou externe.

Solution interne : Un mécanisme de confirmation au niveau du consensus qui vérifie le temps du bloc par rapport au temps réel devrait être introduit, ou un système de temps indépendant avec une plus grande précision devrait être établi.

Solution externe : Les blockchains ont besoin d'un réseau décentralisé qui utilise un réseau d'oracle temporel similaire à NTP pour ajouter des horodatages précis aux blocs du réseau et aux transactions au sein des blocs.

Dans le contexte de la collaboration multi-chaînes, la solution externe pourrait être plus appropriée. En supposant, par exemple, qu'Ethereum et Terra aient leurs propres horloges, si les horodatages fournis par ces horloges sont différents, il sera difficile de déterminer lequel est correct lors des interactions entre les deux. Par exemple, dans un réseau informatique conventionnel, il n'y a finalement qu'une seule horloge maître qui indique l'heure à tout le monde. Les blockchains ont également besoin d'une horloge maître.

Dans le futur multivers rendu possible par les chaînes multiples, nous ferons face à un autre défi — le nombre d'horloges sur tous les différents ordinateurs est bien supérieur à ce qui est attendu. Par exemple, il y a des horloges de jeu, des horloges d'accumulation d'intérêts DeFi, des horloges blockchain, etc. Comme ces horloges perturberont le temps dans les nœuds meta, une source unique et fiable de temps sera nécessaire pour unifier et synchroniser toutes les transactions. Lorsqu'un tel réseau d'oracle temporel sera finalement largement adopté, il fournira une couche de sécurité supplémentaire, offrant des confirmations temporelles additionnelles à chaque transaction, comme dans le monde réel. Le temps deviendra également une couche de sécurité supplémentaire pour les réseaux blockchain.

Référence :

Recherche CoinEx : Le Dilemme de Sécurité des Actifs Blockchain : Pourquoi le Temps Réel est Nécessaire comme Couche de Sécurité Supplémentaire